Paris (Le figaro) 19/12/2005 - C'est la grande misère des monuments romains : superbes, mais privés d'entretien. La Domus Aurea en est la dernière victime. Rouvert en juin 1999 àl'issue d'une restauration superbement réussie, le dernier palais de l'empereur Néron vient d'être ànouveau fermé au public pour deux ans. «Cette mesure se justifie par des risques d'effondrement. L'eau s'infiltre par le plafond et les parois, avec des effets dévastateurs sur les fresques et les enduits», a annoncé le ministre des Biens culturels Rocco Buttiglione, visiblement contrarié. Cela fait des mois qu'il demande une rallonge budgétaire pour effectuer les travaux de première nécessité. Au lieu de cela, les crédits alloués pour l'an prochain àson ministère ont été réduits. La décision «conservatoire» de fermer la Maison Dorée a été prise àl'issue d'une inspection technique. «Pour le moment, les murs ne courent aucun risque», affirme le surintendant aux biens archéologiques Angelo Bottini. Mais il suffit qu'un fragment de cinq centimètres se détache d'une voûte pour faire démarrer les mesures de sécurité préventive.
C'est un coup dur pour l'archéologie romaine, qui cherche par tous les moyens des ressources additionnelles. A cinq euros le billet, les visites rapportaient un demi million d'euros par an. Moins que le Colisée : 21 millions d'euros pour 3 millions et demi de visiteurs. Et que les Thermes de Caracalla, 685 000 euros pour 211 000 droits d'entrée payants. Pour compenser ce manque àgagner, certains songent àfaire ànouveau payer le privilège de se promener sur les Forums romains ou sur la via Appia, deux moments de rare émotion dans le plus vaste parc archéologique du monde.
Pour mettre en sécurité la Domus Aurea, cinq millions d'euros seraient immédiatement nécessaires. Rocco Buttiglione demande àson collègue de l'Economie de les débloquer. Sans grand espoir de se faire entendre en ces temps d'austérité budgétaire.
Parmi les vestiges de la Rome Antique, la Maison Dorée est un mythe, une légende. C'est en 64 de notre ère, àl'âge de vingt-six ans, que Néron, après avoir incendié Rome trois mois auparavant, décide de faire construire un palais àsa gloire sur les collines du Celius et de l'Esquilin. Un terrain de 80 hectares est exproprié pour permettre àses architectes Ottone et Vittorius d'édifier un complexe de 150 salles, dont 32 seulement ont été restaurées àce jour. Les lieux dépassent en magnificence tout ce que l'Antiquité connaît : marbres précieux, colonnes serties de placages d'or, statues monumentales dont un Apollon nu de 35 mètres de haut àl'effigie de Néron, vastes lacs qui s'étendent àl'emplacement du Colisée actuel. Le sanguinaire tyran n'en profitera que six mois. Ses successeurs Othon et Vitellius y résident mais Trajan décide en 104 après J.-C. de le transformer en de vastes thermes et en fait raser le deuxième étage. Il faut attendre les peintres de la Renaissance, Ghirlandaio en premier, pour assister aux premières explorations. Quant aux fouilles proprement dites, elles se déroulent au XVIIIe. Inaugurée àla veille du Jubilé de l'an 2000, la Maison Dorée a attiré une foule de curieux et d'amoureux des vieilles pierres.
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