Cappadoce : terre des merveilleux rochers
Goreme – Turquie- Dominick Merle
Si vous n’avez pas la possibilité de voyager dans l’espace cette année, pensez àvisiter cette région. Peut-être, est-ce le lieu qui ressemble le plus aux roches de la lune. C’est une sorte de scène d’un « monde extraterrestre » présentée par un réalisateur talentueux tels que Spielberg ou Lucas.
Nous sommes ici en plein centre de la Turquie, dans une région nommée Cappadoce, où la nature a formé des reliefs rocheux coniques enveloppant l’horizon d’une façon étrange. Certains paraissent comme d’immenses tentes, d’autres comme des roches de l’espace attendant d’être lancés et d’autres encore comme des Derviches tournant sur eux-mêmes. Ces derniers sont d’ailleurs originaires de cette région.
La formation de ces roches extraordinaires s’est étalée sur des millions d’années. Cela a commencé, en somme, avec trois volcans qui étaient aux sommets de trois hautes montagnes. Les nombreuses explosions volcaniques qui remontent à10 millions d’années environ, avaient recouvert la région de leur poussière qui s’était solidifiée constituant des roches douces et lisses. Les facteurs d’érosion, tels l’air et l’eau, ont, àtravers les siècles, façonné ces roches en reliefs fuselés suspendus et en bosses étranges telles qu’on les voit aujourd’hui.
La forme la plus saillante est peut-être celle des roches erratiques qui se dressent au sommet des autres rochers. Elles ressemblent aux chapeaux et elles ont une qualité supplémentaire, celle de protéger les roches des facteurs d’érosion.
Les mythes de Cappadoce racontent que ce sont les anges qui avaient porté ces roches aux sommets. C’est pourquoi ils s’appellent « les cheminées des anges ». Mais, la réalité et non la mythologie, indique que les premiers résidants dans cette région, les Hittites, avaient construit des refuges dans ses reliefs en creusant des roches tendres. Les Byzantins chrétiens les avaient utilisés comme refuges au premier siècle de l’ère chrétienne lorsqu’ils avaient fuis les Romains.
Les Chrétiens ont constitué une grande communauté religieuse parmi la population de ces roches. C’est un patrimoine qui constitue un bijou de cette terre extraordinaire. Les autochtones appellent cette région située près du village Goreme, « le musée ouvert ». Il y avait quelque 356 églises dans cet ensemble, une pour chaque jour de l’année. Environ une trentaine d’elles restent ouvertes au public. La vue de cette région, qui surprend sur l’étroite route, a l’effet d’une sensation extraordinaire. On a besoin de toute une journée pour la découvrir.
Outre l’étrange nature àla surface de Cappadoce, son sous-sol présente autant d’étrangetés, malgré qu’il soit l’œuvre de l’homme. A quelques miles du Musée ouvert, où la surface est plate, on a découvert environ trente villes en creusant àtravers les roches en sous-sol. On croie que les Hittites avaient creusé les premières couches ; alors que les Chrétiens avaient creusé les couches inférieures en guise de refuges durant les guerres. Les villes construites dans les sous-sols comportaient des églises, des écoles, des cuisines publiques, des moulins de vigne, des puits et des passages aériens, qui sont fermés lorsqu’ils sont découverts par les ennemis envahisseurs.
L’arrivée àcette région n’est pas difficile. En raison de la tension que connaît le monde, les prix ont considérablement baissé, par rapport au niveau habituel. Plusieurs agences de voyage commercialisent Istanbul et Cappadoce. Mais, pour ceux qui veulent l’aventure et ont un budget limité, je propose une alternative au voyage aérien àIstanbul : prendre le bus, qui est propre et àbon prix, jusqu’àla capitale Ankara ; louer une voiture jusqu’àCappadoce qui est àquatre heures de route. Les routes sont bonnes et fournies en panneaux de signalisation. De nombreux autochtones parlent anglais et peuvent vous aider. Vous aurez la totale liberté de vous arrêter làoù vous voulez et de vous promener dans les lieux de votre choix.
Mieux encore, vous pouvez trouver un logement àbon prix, car l’hébergement n’est pas du tout un problème. A un hôtel de Goreme, nous étions seulement deux hôtes alors qu’il y avait quatre employés dans la seule salle d’accueil. Nous avions passé une autre nuit dans l’une des forteresses de roches transformée en hôtel. Notre chambre-caverne était dotée de Jacuzzi et de télévision satellitaire. Nous y étions également les seuls hôtes. Après un petit marchandage, vous pouvez avoir une chambre dans un hôtel de quatre étoiles àmoins de 25 dollars par personne, avec petit-déjeuner.
L’argent n’est pas nécessaire, en tout cas. Dès le moment où l’on arrive àces plages, on est plus que millionnaire. Le taux de change était alors de 1,4 millions de livres turques pour un dollar. Le déjeuner seul coûtait 3 millions de livres.
Nous avion habité àGoreme, au centre de la région de Cappadoce. C’est un village qui a une vue affectueuse. Mais, sans la voiture, on aurait ressenti une certaine gêne, suite àune marche sans fin entre boutiques et restaurants sur les deux bords dans une petite zone. Ainsi, nous avions pu aller voir, grâce àla voiture, les villages voisins : Zelve, Avanos, Urgup pour changer. Chacun de ces villages a sa beauté propre. Mais nous avions préféré Avanos, car il était plus naturel et moins touristique.
Il y a encore de nos jours 1000 personnes se réclamant d’« habitants des cavernes » àCappadoce, nous avaient indiqué des fonctionnaires du tourisme. Mais, la grande majorité d’entre eux, ce sont les boutiquiers qui vendent les tapis et autre articles le jour et qui retournent àleurs habitations réelle la nuit. Il y a également un grand nombre de cavernes rocheuses qui ont été transformées en hôtels, dont 25 au seul Goreme. Je peux développer cette idée et dire que je suis aussi qualifié pour devenir un habitant de Cappadoce et un résident des cavernes durant une nuit.
Toutefois, il faut déployer un grand effort de recherche pour trouver un de ces véritables habitants des cavernes qui regardent, sans doute, une station satellitaire présentant un film de Spielberg.
Lorsque j’avais visité la Turquie, il y a 20 ans, je l’avais considérée comme une découverte-surprise de la carte du tourisme international. Au cours de ce voyage j’étais parti d’Istanbul vers la côte de la mer Egée et vers les vestiges romains de Ephesus. Mon deuxième voyage, il y a six ans, avait pour destinée la mer Méditerranée et la station balnéaire Anatolie. Je me demande encore une fois pourquoi les gens considèrent la Turquie comme une escale d’une nuit ou deux et non comme une destination touristique ?
Le temps du départ est venu ; en outre, il me reste quelques millions de livres àdépenser avant de partir.
(Dominick Merle est écrivain de tourisme et consultant résidant àMontréal) |