nour-eddine saoudi
LE CAIRE (AFP)24/7/05 - La série d'attentats ayant frappé en pleine saison estivale la station balnéaire de Charm el-Cheikh samedi, faisant au moins 88 morts, risque de donner un coup fatal au secteur touristique égyptien, de nombreux vacanciers fuyant la ville en jurant de ne jamais y revenir.
Ces attaques sont intervenues seulement neuf mois après trois attentats àla voiture piégée visant un hôtel et deux camps de vacances près de Taba, une autre station balnéaire du Sinaï, qui avaient fait 34 morts, dont des touristes israéliens, et plus de 100 blessés.
Conscientes des enjeux, le tourisme étant un secteur-clé du pays, les autorités du Caire ont très vite publié des communiqués pour rassurer l'industrie touristique, soulignant que les auteurs des attentats étaient activement recherchés et que les vacanciers n'avaient pas annulé leur séjour. Le général Mohamed Zamzam, qui dirige les services aéroportuaires égyptiens, a précisé que quelque 6.000 touristes étaient arrivés samedi àCharm el-Cheikh, malgré les attaques et qu'aucun vol vers l'Egypte n'avait été annulé.
"Bien sûr, ces attaques auront un impact négatif sur l'industrie touristique mais il est encore trop tôt pour en mesurer l'impact", a relevé la porte-parole du ministère égyptien du Tourisme Hala el-Khatib. "A la lumière de ce qui arrive dans le monde, àLondres, au Liban ou en Espagne, nous sommes certains que les gens ne sont pas prêts àcapituler face au terrorisme et àabandonner leur liberté", a-t-elle ajouté.
Mais, dans Charm el-Cheikh dévastée, de nombreux touristes, essentiellement venus des pays du Golfe, d'Europe et de Russie, tentaient d'attraper un bus pour quitter la station balnéaire. "Nous étions ici l'année dernière. Mais, l'ambiance a complètement changé. Nous avons peur de revenir ici de nouveau, après une expérience si terrifiante", a déclaré Jimmy Hayes, un Ecossais. Environ quatre heures après les attentats, des groupes de touristes traînaient leurs bagages àtravers les débris des bâtiments pour embarquer dans les premiers bus au départ.
Issa Ibrahim, qui a un café près du site des attentats, ne se fait aucune illusion sur les conséquences des attaques. "Ils ont vraiment frappé au coeur de la saison touristique et dans des zones très fréquentées. Ce qu'ils ont réussi àfaire, c'est que maintenant tout le monde va dire: +tous les musulmans sont des terroristes, nous n'irons plus chez eux+". "Il est rare de voir des annulations le jour même mais cela ne fait aucun doute que les réservations vont être très lentes dans les prochains jours", a confirmé Hicham, qui travaille avec un voyagiste basé au Caire. "Charm el Cheikh est une destination phare en Egypte et les attaques auront de sérieuses conséquences sur les décisions des touristes (concernant leurs lieux de vacances). Mais ce genre de violences ayant lieu dans le monde entier, il est difficile d'anticiper les réactions des gens", a-t-il ajouté.
Joyau du tourisme égyptien, Charm el-Cheikh accueille régulièrement des conférences et sommets internationaux, notamment sur la paix au Proche-Oreint. Le président Hosni Moubarak y dispose d'une résidence et s'y installe une partie de l'année pour recevoir ses hôtes. Mais l'élément le plus inquiétant est la succession d'attaques visant spécifiquement les sites touristiques, soulevant de nombreuses questions sur la capacité des autorités àcontrer les organisations extrémistes et àgarantir la sécurité pour les vacanciers.
Depuis octobre, deux attentats de moindre envergure ont ainsi eu lieu dans des quartiers très touristiques du Caire. Le tourisme, qui a connu une très forte expansion depuis la signature de l'accord de paix israélo-égyptien il y a 25 ans, est une des principales sources de revenus de l'Egypte. En 2004, plus de 8 millions d'étrangers (Italiens, Russes, Allemands, Français et Arabes) ont passé leurs vacances en Egypte, dépensant quelque 7 milliards de dollars, selon des statistiques officielles. |